Ces livres devenus plus que des livres



                                     

Au détour d’une conversation sur Messenger avec un ami virtuel, il m’a fait part de cette requête : « Tu me feras la shortlist de tes œuvres coup de cœur Je veux les mettre dans mon panier si je ne les ai déjà ». 

Et tic, l’idée d’écrire un article pour faire un curriculum vitae de mes lectures m’est venue à l’esprit. Sa requête n’est pas une chose aisée pour deux principales raisons. Tout d’abord, je pense qu’un livre devient notre coup de cœur pour une raison souvent personnelle, intimiste. Aussi, je voue un énorme respect à tous les auteurs. Le choix de se consacrer à l’écriture d’une œuvre est très noble. C’est pourquoi je vénère tout livre. Seulement comme nos collègues, certains restent des sympathisants et d’autres, plus que des collègues deviennent, au fil du temps, des amis. C’est ma description imagée de mes rapports avec les livres.

Alors quoi dire ? Je ne sais pas. C’est toujours difficile de parler des êtres auxquels nous avons un grand amour fussent-ils inanimés. C’est le même sentiment qui m’anime au moment d’écrire cet article. Car plus que de simples livres, je suis en train de parler avec mes plus grands et fidèles amours – Ne riez pas s’il vous plaît, je suis sérieuse :). C’est presque un pléonasme de dire que j’adore les livres du moins devant les gens qui me côtoient. Et pour vous autres qui ne me connaissent pas, alors oui, je vous confirme avec toute la prétention requise que j’ai une grande, très grande, passion pour la lecture. J’adore lire. Au-delà d’une activité ludique où d’une quête de connaissance, la lecture participe tout simplement à mon équilibre comme le voyage d’ailleurs. C’est une nécessité. C’est ma soupape.

J’ai commencé vraiment à lire depuis mes 16 ans. A cet âge, j’ai tout fait pour me procurer un livre vu au hasard sur internet. Le titre du livre avait réveillé ma curiosité. C’est « le pagne léger » de Aïssatou Diamanka-Besland. J’ai eu le livre, par la suite, grâce à une cousine qui faisait ses études en France à l’époque. Elle a eu la gentillesse de me l’acheter et lors de ses vacances d’été, j’ai eu mon livre et je l’ai remboursé les 12euros. Je pense que la lecture de ce livre fût le point de départ de ma passion pour la lecture. J’étais une adolescente qui se cherchait donc j’étais plutôt curieuse de découvrir ce qui se cachait derrière ce titre. Sa lecture m’a beaucoup aidé à régler mes questionnements sur la sexualité que je n’osais pas, par pudeur, demander à mes parents à cette époque.

Par ailleurs, disons que mon amour pour la lecture a été séquentiel. Suite à la lecture de ce livre et d’autres livres lus soit pour combler le vide, soit grâce à l’influence d’une amie qui aimait beaucoup lire avec qui je trainais au collège, soit tout simplement par curiosité. Je lisais vraiment de manière intermittente. 

Et bam, je rencontre mon prof de philo en terminale littéraire qui a commencé à m’initier vraiment à la lecture en me prêtant des livres. Il m’avait rendu accro à la lecture. Le livre qui m’a le plus marqué venant de lui c’est « Mes hommes à moi » de Ken Bugul. Le ton du récit de ce livre est d’une sincérité exquise. Ce livre après sa lecture, pourra pousser chacun de nous à jauger, à réévaluer ses rapports avec ses hommes ou ses femmes dont il/elle a eu à rencontrer dans sa vie. Pas forcément dans le cadre de l'amour mais en terme de qualité humaine simpement. Comme j’aime le dire, Ken Bugul est mon auteure fétiche. J’ai lu tous ses livres. Mais celui-ci reste mon préféré. 



                                       Crédit photo: Antoine Tempé

« Nous avons tous des histoires. Des histoires cachées, dissimulées, occultées. Des histoires superposées à d’autres histoires, des histoires remaniées, des histoires transformées, des histoires expliquées, des histoires reconstruites, ainsi de suite. Chacun a son histoire. (…) il n’y a pas d’histoires malheureuses ou d’histoires heureuses. Il n’y a que des histoires. » in Mes hommes à moi,p.245.

Avant de continuer à dérouler mon cv livresque, je tenais à dire que la raison principale pour laquelle je lis c’est pour m’évader car je suis une personne qui s’ennuie affreusement. C’est pourquoi, j’ai pu trouver ,avec les livres, un palliatif à ma propension à s’ennuyer. 

Toutefois, je vais relater mes voyages livresques en deux parties.

 Certains livres m’ont laissé avec de fortes émotions à cause de la nature des faits relatés dans le récit. D’autres ont changé fondamentalement ma vision des choses, mon rapport avec moi-même, avec les autres. Ces livres ont répondus à mes questionnements, mes craintes, et parfois même ils ont fortifié mes faiblesses.

Ces livres qui m’ont laissé des émotions …

Mohamed Mbougar Sarr. De purs Hommes. 


La manière dont Mbougar aborde la mort est juste sublime. La partie qui traite de la mort dans ce livre mérite juste d’être lue entièrement. Un extrait ne saurait suffire à cause de sa beauté.C’est pourquoi je vous laisse lire le livre et découvrir par vous-même.


                                                 Crédit Photo: Rabia
 Le regard de l’aveugle. Mamadou Samb 

L’histoire narrée dans ce livre est d’une grande tristesse. A travers ce livre, j’ai pu avoir un aperçu de ce que vit réellement les aveugles de la capitale du Sénégal, Dakar. Notre habitude de les côtoyer tous les jours amoindrit notre empathie envers ces êtres. D’ailleurs, souvent victimes d’une exclusion sociale. Ce livre nous fait voyager dans leur univers.

 Le Lambeau. Philippe Lançon

J’ai beaucoup, beaucoup aimé ce livre. C’est mon livre coup de cœur. La sincérité de la trame. Le courage de l’auteur et sa force à retracer la raison d’être de ce livre : l’attentat Charlie Hebdo. En tant journaliste, il a été parmi les victimes. En évoquant cet évènement, vous imaginez déjà l’atmosphère de la narration. Mais loin de faire de ce livre, un moyen de diabolisation de l’islam où une ode à la rancune, l’auteur aborde avec philosophie cet épisode de sa vie. Et c’est ce que j’ai aimé dans ce livre .. et surtout avec un jus de pomme comme sur la photo ;).


                                            Credit photo: Rabia

L’ombre en Feu. Mame Younousse Dieng

Le récit de ce livre relate la destinée tragique d’une jeune fille qui avait toutes les potentialités pour réussir. Évidemment, en tant que jeune fille qui venait juste d’avoir le BAC lorsque je lisais le livre, l’histoire ne pouvait me laisser de marbre. L’auteure est décédée il y’a 2 ans. Puisse son âme reposer en paix.

La vie sans fards. Maryse Condé

Dans ce livre, l’auteure tout en relevant certaines problématiques en rapport avec le colonialisme, la négritude, le panafricanisme, retrace la trajectoire d’une femme Guadeloupéenne avec ses enfants parcourant toute seule l’Afrique en tant qu’enseignante en affectation dans le continent. Les péripéties du personnage principal ne m’ont pas laissé indemnes. J’ai pu comprendre c’est quoi, être une femme célibataire en Afrique. Une femme qui se veut libre de par ses idées et de son corps.

Leila Slimani. Chanson douce. 

Ce roman est d’une douce sensibilité. Une sensibilité sanguinaire dirais-je. J’ai beaucoup aimé le génie de l’auteur dans sa technique de narration. Son pouvoir à dompter les émotions de son lecteur comme des montagnes russes émotionnels à travers l’histoire d’un couple marié. J’ai lu aussi, Dans le jardin de l’ogre, du même auteur mais je n’ai pas beaucoup aimée.


Ces livres qui ont changé ma vision des choses…

Dahij. Felwine Sarr

Évidemment le livre intitulé Afrotopia du même auteur est plus connu par le grand public. Mais comme je ne cesse de le dire, je préfère Felwine en Nouvelles. C’est un avis personnel bien sûr. Je n’ai jamais lu Afrotopia. Comme j’ai dit plus haut, je lis pour m’évader. Et les essais, je les trouve trop lourd pour un voyage livresque. Ainsi donc, j’ai lu Dahij la première fois car un ami me l’avait prêté. Après lecture de ce livre, j’avais l’impression d’être électrocutée. Ce livre a répondu à des questions que je me suis toujours posée sans jamais eu de réponses. J’ai eu l’honneur de rencontrer l’auteur qui m’a dit après m’avoir écouté s’extasier devant lui pour son livre (Mdr ! comprenez mon obsession) que : « chacun peut avoir un rapport personnel avec ce livre ». J’ai aussi aimé Les méditations africaines du même auteur. Je n’ai pas beaucoup aimé Rue Carnot, une autre nouvelle du même auteur aussi. Mon fameux prof philo, qui m’a d’ailleurs offert le livre, dit de la plume de Felwine, qu’elle est cordiale et divine. Et je suis d’accord avec lui.



                                           Credit photo: Rabia

Tous les livres de Rumi, Khalil Gibran

Ces auteurs sont à lire. Au-delà des appartenances religieuses, il est parfois utile de cultiver sa propre spiritualité surtout dans nos sociétés anxiogènes où l’individualisme prenne de plus en plus de place. Leurs œuvres aident à retrouver un certain équilibre en te poussant à se réconcilier avec soi-même. J’ai beaucoup aimé la sagesse de leur plume.

 Les coquillages de l’amour. Oumar Sall

Ce livre m’a été envoyé par l’auteur lui-même suite à notre affinité à travers Facebook. Son cadeau fût exquis. Ce livre est un joyau car il est plein de leçons de vie, de philosophie sur la vie. Depuis c'est devenu mon puits de sagesse où je m'abreuve souvent. Ce livre, je le résume en deux mots : Sagesse et Questionnement. 

" Vivre les rencontres comme des rendez-vous avec soi à travers les autres. Honorer convenablement ces « chocs ». Savoir vivre dans l'imminence de « tous les chocs possibles ». Ne jamais être surpris. Refuser de vivre le nouveau comme l'impossible. Parce que la greffe n'est jamais mortelle quand elle est acceptée. Le mal est de la subir" in les coquillages de l’amour, p.8

Livre disponible en format PDF comme l’Ebook sur le site de l’éditeur : Edilivre.


                                          Credit photo: Rabia



The Origin of Others. Toni Morrison

Pour les personnes passionnées par les questions d’identité. Ce livre est un must-read. Au fil de la trame, la matriarche avec un ton franc questionne mais aussi essaie d’expliquer les raisons pour lesquelles les problèmes identitaires occupent souvent les chaumières de nos jours avec des sources issues de la littérature afro américaine. J’ai tellement aimé le livre que j’en ai acheté un deuxième exemplaire pour l’offrir à un ami. Pour les francophones, le livre est aussi disponible en français avec comme titre, l’origine des autres.



                                        Credit Photo: Rabia

 Karim. Ousmane Socé Diop

J’adore me perdre dans les classiques sénégalaises pour découvrir le Sénégal d’avant. Ce Sénégal, j'aurai bien aimé l'avoir vécu, les gens étaient si raffinés, une structure sociale bien organisée avec des valeurs idoines sans pourtant être trop restrictives par rapport à l’épanouissement individuel. L’auteur ne manque pas de prévenir pourtant lors de son époque sur ce que nous vivons en ce moment comme déliquescence, anomie et dérives dans la société sénégalaise. Je vais ranger Niwan de Ousmane Sembène dans le même registre. J’aurai aussi mis le livre de Souleymane Elgas, Un Dieu et des Mœurs ainsi que les livres de Abasse Dione à savoir Ramata et La vie en spirale dans le même lot s’ils étaient de la même époque. Par contre, j’ai trouvé ces romans plus engagés, plus inquisiteurs que Nini de Abdoulaye Sadji

« Au Sénégal, malgré les efforts de l'École française, on ne voulait pas instruire les filles : " Une femme cultivée est une source d'infortunes conjugales ". Il fallait donc un harem moral : enfermer l’esprit, instigateur du corps, dans la forteresse de l’ignorance. Seulement, l'expérience n'a jamais démontré que les femmes incultes fussent les plus fidèles. Et, d'autre part, une évolution décisive de la société ne pourra se faire sans le concours de l'élément féminin. A l'école française, la sénégalaise acquiert un bagage de connaissances qui la rendent plus consciente de son rôle, capable de donner aux enfants les premiers éléments d'une éducation rationnelle et d'introduire dans le ménage plus de bien-être et d'hygiène. » In Karim. p. 90-91 




                                              Crédit photo: Rabia

 Return to Tipasa, in The Myth of Sisyphus. Albert Camus 

Lire Albert Camus s’avère souvent très lourd à cause de sa plume philosophique voire iconoclaste et singulière. Camus désarçonne profondément. Mais j’ai aimé cette nouvelle. Il y’a cet extrait qui m’y plait particulièrement : 


« In the middle of the winter I at last discovered that there was in me an invincible summer. » in Return to Tipasa.

Je suis en train de lire deux livres qui ont reçu des prix à savoir, frère d’âme de David Diop et Silence du Chœur de Mouhamed Mbougar Sarr. Peut-être après lecture, ils feront partie de mes livres-amis ? Restez connectés en s’inscrivant tout en haut du blog, j’en parlerai bientôt :) et dites-moi en commentaire vos livres coup de coeur aussi. Donnant-Donnant non ? 



                                                 

Commentaires

  1. Je suis très fière de toi ma belle.
    Toujours un plaisir de te lire.
    Bonne continuation, je suis toute fière 😂.
    Tu me manques.
    Bisous

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  2. Une bonne majorité de vos choix font aussi partie des miens....et pourtant bien des années nous séparent. Merci pour votre travail, il est bien utile

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  3. Quel CV! Je réalise que tu lis beaucoup de livres d'auteurs africains, une chose que je ne fais pas assez. Avec les nombreux titres partagés, j'ai de quoi démarrer. Merci Rabia.

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